03/02/2014
sans titre 7.6 (en cours)
Elle se coiffe devant la glace, pendant que le plus petit de ses enfants gribouille sur le carrelage de la salle bain, et toute les cinq minutes recommence sur une autre feuille le même dessin qu'aussitôt achevé il tend a sa mère en lui disant que c'est elle qu'il a dessiné; elle se retourne, s'exclame avec affectation que le portrait est magnifique , très ressemblant et dépose le papier sur un petit tas de feuilles ou s'accumule les dessins précédant qui la concerne; puis se retourne et dans la glace continu a se coiffer, en écoutant l'Orphée de Glück qui la pince au coeur, la conseille et lui parle dans la même musique que son coeur, d'un astre étincelant disparu au fond d'un gouffre éteint; le grain des voies la comble d'un indicible baume de douceur surgit du plus lourd poids de sa peine; elle se coiffe lentement, a un rythme presque baroque, en se laissant imprégner des vers de l'auteur qui remontent a la surface de la faille et transforment sa douleur en une mer calme annonciatrice de joie qu'elle discerne a peine et s'en effraie; elle se sent déchirée par une passion indomptée que la musique apaise; elle a l'impression d'être au fond de la mort, de coiffer ses boucles de henné dans les reflets de son oeil éternellement impavide et morne; elle est l'unique habitante d'une vallée de larme ; elle se reflète dans l'immuable, bouge sans raison, dans le silence éternel du trèpas ou tout apparaît; tout jusqu'au moindre détails, de ce qui bouge ou a bougé en elle ses derniers temps, jusqu'au déchirement final de la passion parvenue a son terme, parvenue aux limites d'elle-même, elle cesse un instant de se coiuffer, se regarde, et finallement se voit comme elle doit se voir, dans la transparence de la mort ou l'on ne descend pas sans souffrances; et elle semble ne plus chercher ailleurs l'image d'elle-même; elle se coiffe, comme on attend, comme un poète réfléchit dans sa cage au dernier etage d'un immeuble; elle se blanchit de chaux pour mieux faire saillir cette part de lumière qu'elle est et dont elle ne sait maintenant plus que faire; ses gestes son lent, a nouveau l'enfant lui tend un dessin; elle le prend comme si elle était un monstre surgit de la mer sur laquelle flotte le motif d'un bateau; elle s'émeut en le voyant; « il perçoit déjà tant de couleur! »; elle se sent vieille, s'effraie de perdre l'image de sa splendeur, celle qu'elle perçoit imparfaitement dans les retouche de maquillage qui et qui la cerne pourtant, en se coiffant comme une morte quand plus rien dans le miroir ne l'attire et que sa passion s'est éteinte pour mieux laisser rayonner cette joie lumineuse qu'elle croit lui manquer parce qu'elle voudrait percevoir autre chose qu'elle même comme realité; un peu plus fort elle serre la brosse comme pour se raccrocher a quelque chose qui serait exempt de nullité face a ce vide ou elle se penche pour mieux se voir, mieux s'approcher d'elle-meme, en reduisant la distance a rien; « ne laisse pas la mort te submerger ! » se dit elle.
Mais sait elle que la joie est invisible? C'est gluck qui le lui apprend en chantant, dans une langue beaucoup moins imparfaite que la langue vulgaire, que la matière de ce qu'elle cherche est deja en elle eternellement et qu'elle n'a plus l'occasion de la faire paraitre autrement qu'en affrontant enfin sa propre mort réellement; elle le sent comme quelque chose qui vit absurdement au coeur meme de la mort, et en le vivant le comprend intuitivement; elle comprend que la mort est la face cachée de l'invisible joie; et que son image est la face visible de l'éternelle joie qu'elle perçoit dans le néant miroitant.
Elle se sent forte et faible a la fois, triste et gaie comme une lune aux phases déréglées, une girouette devenue folle et qui perd du sang. Et quand elle veut penser a celui pour lequel elle vie, deux visages lui apparaissent si lointain, si distant, qu'en se sentant si déchirée, tellement inaccessible et belle, elle a envie de crier au miroir qu'il se brise; elle ramasse les feutres qui traînent tout autour d'elle en formant des segments de cercle vaudou, soulève l'enfant, l'emporte et éteint la lumière en sortant.
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