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04/10/2013

sans titre

Loannis sentit du creux de son estomac les mots plissés de Mendizabal pendant le dîner, reprendre la direction de la mer ; il avait été au début du repas, trop inattentif a ce que disait Mendizabal, trop mélancoliquement concentré comme toujours selon l'inclinaison de sa déplorable habitude a trop intérioriser, a écouter et surprendre le bruit de la poussière remuée dans la chute des mots, pour suivre le cours réelle de la conversation qui s'évidait comme une bobine de fil en pelote dans sa tête confuse ne parvenant plus a rattacher les morceaux ; des murs de silence tombaient entre eux, comme dehors les cloisons de la nuit, entre les linguales froissements de la mastication et ce bruit de neige étouffée des mots qu'on prononce sans avoir conscience de le faire quand on parle en dormant, quand, un rêve marche dans la cendre encore chaude sous le sommeil, ou pourtant, Loannis, étrangement devinait, semblait attendre qu'un déchirement l'extirpe du rêve. Quand il dînait chez eux, Loannis perdait ce regard vague jeté avec mépris sur les choses ; un instant, un court répit lui était accordé ; l'intelligence de son malheur se suspendait au clou du rire, il se sentait bien, presque heureux ; toutes les choses portaient un nom, tout était précis définit, contagieusement signifiant, heureux ; et lui qui côtoyait quotidiennement de si près les crimes les plus violent, lui dont le métier était de limiter l'essor du mal le plus odieux, ponçait alors par le rire les reliefs acérés et stridents des contrées barbares d'ou il venait et qui de toutes façons le débarquaient ; quand ils riaient toutes choses subissaient une étrange transformation, l'ancien temps disparaissait révolu dans le métabolisme philosophique d'une gestation nouvelle de la contradiction ; tout le malheur d'être rentrait a nouveau dans la possibilité d'advenir autrement et différemment étranger a la souffrance ; tout résonnait d'une étrange lueur de contradiction, et le monde implosait, se mettait a brillait un bref instant ; la tragédie englobait les siècles et domestiquait le temps comme recourbé et renvoyé a lui-même ; le poivre et le sel se disaient merde pour dire qu'ils s'embrassaient ; et par une sorte de vertige fascinant les rideaux dépareillé le tons de la chemise, et le voile s'épaississait a mesure qu'ils le déchiraient de rire.

Par la fréquentation assidu du malheur des hommes, du mal qui anéantie sans laisser aucune trace capable de rendre compte de l'éclosion justifiée du néant, Loannis avait pris l'habitude de conserver une certaine distance, lorsqu'il écoutait quelqu'un parler, cherchant instinctivement ce qui clochait dans sa déposition, accentuant son penchant a croire que les paroles des hommes ne sont souvent que la pente par ou ils fuient le réel, puisqu'il était de son devoir de flic, de suivre les pensées jusqu'à leur déboires, jusqu'au racine du mensonge, jusqu'à la justification ou pas du dire et de l'être comme si toute enquete n'avait jamais eut pour objet que la recherche d'une conscience réelle ; quand il se délassait, Loannis devait remonter depuis le fond de ce recul ou il laissait venir a lui l'intégrité de la parole et des consciences ; il semblait revenir de très loin, d'une contrée d'abîme ou les êtres et les mots sont deux choses différentes, ou il n'attendait plus justement cette épiphanie de la conscience, mais y ayant renoncer, laissait les paroles et les mots lui glisser dessus comme de l'eau a laquelle cependant il ne voulait pas se réduire a devenir complètement imperméable ; si bien qu'il finissait souvent par ne pas attendre la fin d'une phrase pour se croire certain de son non sens ; a de tel moment, il était plus attentif au remous invisibles que la parole provoquait de trouble sur les lèvres remuantes qu'a saisir en lui le sens de ce que son interlocuteur disait et qu'il ne pouvait ingérer sans comprendre que ce sens n'avait rien a voir avec toute la profondeur du trouble chaotique des muscles faciaux ou la parole naissait. Mais quand il dînait chez Marta et Mendizabal cette débâcle absolue des articulations du comprendre faisait relâche dans son esprit, et le sens des mots a nouveau s'inscrivait dans leur source visible quoiqu'incomprehensible ; il ne tremblait plus d'angoisse mais souvent se tordait de rire. Alors Mendizabal actionnait sa mâchoire a vide ; les boucles de Marta couvrait son visage noyé et son corps plié en deux sur une chaise sous une douche de cheveux, dont l'immobilité absolue tournoyait dans les couverts de cuisine, comme un échos dans la caverne du vide, qui finissait toujours cependant, par retrouver le sens de la paix le calme, la sereinité et le silence au repos ; le rire fusait, Mendizabal le visage étoilé par une étincelle coincé entre les dents, gargarisait l'air ambiant a grande goulée, soigneusement espacées de temps mort, ou la respiration, et le souffle le quittaient ; ils riaient tant que l'espace confiné de l'appartement n'avait plus de limite ; leur éclats de voies sautaient la balustrade du balcon derrière les rideaux bleu, parcouraient le fil qui pend entre les étoiles autant qu'il se nichait aussi dans le moindre éclat de cristal vibrant de la table joliment dressée par Marta. L'appartement n'avait plus de dimension mesurable mais la distortion était contenue dans la mâchoire du rire ; Marta tendait les mains en signe de supplique, jetait des poignets d'ombres dansantes dans la robe des vins ; l'isolement du malheur n'avait plus lieu d'être, la terre du malheur s'effaçait en un clin d'oeil ; on comprendra aisément, qu'un tel défaut d'attention envers ceux qu'on aime, puisse facilement être pris pour de l'indifférence, voir de la haine et du mépris ; aussi Loannis ce soir la, qui connaissait que trop bien son défaut, éprouva un indicible soulagement a vaincre son penchant extatique, tout en ayant une conversation spirituelle avec ses amis ; les facultés de son esprit se mettaient alors en ordre selon leur puissances propres, respectives et imparties ; il devenait plus souple, cesser d'être cassant, a cran ; or ce n'est pas que la tentation manquait de suivre jusqu'au bout de soi, la lumière et la brèche que chaque mots d'esprit faisait éclater entre eux, donnant lieu a autant de vifs éclats de voies qu'a des scènes d'une tendresse diaphane et touchante ; mais la ou l'on rit, l'imperméabilité de la parole et du réel, est sur le point de devenir une unité heureuse et Loannis ne voulait pas gâcher ces brefs instants de joie ; bizarrement, la fréquentation quotidienne du mensonge des hommes, avait rendu Loannis expert en matière d'humour ; Loannis laissait les mots se suivre jusqu'à former le remous du désaveu qui rendait clair et transparent le rire sonore de Mendizabal, brêlant des lèvres comme celles d'un flûtiste prises dans le sillage d'un bateau a aube qui l'embarquait et avait laissait une trace dans la salière qui tanguait, renversée entre les doigts de Marta.

 

Loannis, perplexe, et sans rien montrer, tentait de contenir en lui le cri d'une mouette, et pour ne pas se trahir il préféra s'abandonner au naturel battement des ailes ; il demanda le sel a Marta, sans rien dire, comme ça d'un simple regard complice qu'il glissa sous la conversation ; et il n'eut pas beaucoup a le chercher tant ce couple ami était spirituel ; leur présence rendait tout tellement plus souple, qu'on aurait dit les aspérités du temps aplani ; avec eux Loannis ne ressentait plus sa peine mais a nouveau appartenait au monde, se fondait dedans comme un réceptacle bienheureux ; avec eux il se sentait bien ; et quoique rien ne fut réellement changé a son histoire, quoique le jaune pisseux de son ancien club soit resté dans sa mémoire un idéal perdu, il cessa un instant, de croire a l'impossible retour du même ; et ce qui était ensevelit dans le désert du temps, repris vie, se souleva comme une image parallèle et se hissa jusqu'au bord d'une piscine de la mémoire d'où elle ressortit, ce soir la, sous la forme d'une nappe. De chez Loannis, a Athénes, Marta avait sans le savoir ramené ce jaune pisseux de son club en cuir, qu'elle avait jeté sur la table en guise de nappe ; Loannis croyait encore l'avoir laisser dans l'hacienda après son départ quand tout était encore en ordre ; avant...et pourtant, ce même jaune pisseux de la nappe qui avait aussi était celui du cuir joyeux de la lecture, de l'étude et des méditations, ce même jaune pisseux qui n'existait plus, il l'avait a nouveau sous les yeux matérialisé sous une autre forme.

 

Et il fallait au moins ça, l'humour complet, pour que réapparaisse dans sa vie une correspondance brouillant toute les échelles de grandeurs ; son esprit perdu dans le ressouvenir des perception ancienne de sa vie d'avant son divorce, réapparaissaient transfigurées mais malicieusement identique ; non pour foutre la merde, jeter le trouble, mais pour rendre justice a une autre idée de l'accord entre ce qui a cause du fil tranché des Parques, avait pour destin d'être sans rapports, incommensurable  comme les parties d'un tout ; ainsi par exemple l'air sombre de la commode de son ancienne salle de bain, se retrouvait converti en bitume, en grain d'asphalte sur la route menant vers Kastoria illuminée, et qui passait juste a l'aplomb du balcon ; la route recouvrait donc un pont, a la fois dénoué par le temps et réorganisé en lien tissé, cette fois  explicitement par l'esprit, dont chacun sait que le traverser est comme traverser un mystère. Perdre. Percer. Retrouver. L'Odyssée de la sainte famille n'avait peut être rien a envier a la palpitante vie de ce couple formé par Marta et mendizabal, couple tout aussi pourchassé et fuyant depuis toujours la persécution de la bêtise et du conformisme, couple uni et emporté par un même amour pour la libre désobéissance de la vie risquée.

Ce soir la, a la fin du repas, Loannis pu laisser refluer de son coeur le souvenir de son ancienne quiétude auprès de sa première femme ; et quoique le temps ait souffler assez fort pour déranger tous les meubles de son ancienne habitation, il s'en rappela l'image sans plus en souffrir ; elle vint comme un revenant, se coller au présent, sans le troubler, sans l'anéantir, mais l'enrichir seulement ; comme un don que la mémoire lui aurait fait, pour qu'il puisse respirer un peu plus librement d'un empan étendu au dela de son mal trop visible a ses yeux, alors qu'il était guillotiné vivant par le destin coupé en deux ; ce soir la ce n'était pas une nappe que Marta avait jeté sur la table du salon mais un dais de soie sur l'entaille, un gaz un baume une brume, un nuage de volupté, un fourmillement incrusté dans des fibres de cotons, un avant goût de la félicite.

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