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24/01/2014

sans titre 4

 

Nanj bu alors toutes les larmes de l'amer désespoir; l'image de son monde se déchira; il quitta sa place d'enseignant et étrangement glissa du monde des apparences vers un autre univers ou le réel n'était plus éparpillé dans les milles scintillements trompeur de la vie surchargée d'exigences contradictoires, qui font la vie aussi praticable que les outils inutiles des surréalistes, mais un univers unifiée, qui brillait du fond de l'abîme, depuis un centre secret invisible et renversé par le pouvoir de la négation; il ne comprit pas tout de suite ce qui lui arrivait; et dans les premiers temps de sa mise a l'écart, et bien qu'il n'éprouva aucun ressentiment a l'égard de l'injustice qui lui était faite, il se sentie interloqué, pris de stupeur, figé de désarroi, comme si sa vie soudainement lui était devenue un mystère opaque, une énigme a laquelle il ne comprenait plus rien, sinon qu'il venait de perdre ce qui en faisait le sens; du moins le croyait il, tant que mystifié il ne comprenait pas encore que son désir venait seulement de faire peau neuve, et qu'il ne le reconnaissait pas; car il n'avait au fond toujours suivit le même penchant par lequel il avait obtenu ses diplômes et enseigné pendant plus de vingt ans jusqu'à ce que sa raison de vivre s'effondre dans la forme ou il la croyait réalisable; et ce n'est que peu a peu, très lentement, que la passion qui l'habitait lui fournit l'explication de l'énigme; chassé du monde des hommes, il se retourna vers sa passion qui n'y était plus la bienvenue; bien sur il ne pouvait se dire: « demain, cours a telle heure », et c'est surtout cette absence de mots qui le laissa interloqué; impossible de projeter sa raison d'être, sa passion, impossible de filer la joie a travers la douleur sans ces mots ou elle avait longtemps habité; ce dernier jour, il rentra dépité, morne, affadi, pesant des tonnes et en lieu et place de son petit appartement de célibataire mono maniaque voué a l'enseignement de sa passion, il ne trouva qu'un grand vide, un alphabet muet; l'odeur du café incrusté dans les murs était comme de l'eau rance et croupie qui l'écoeurait; son bureau, ou il avait passé tant de temps a corriger les copies lui paru plus petit qu'une cellule de prison; a peine l'espace pour se retourner, la bibliothèque semblait fondue dans le mur, plongée dans un sommeil de foret primitive, il n'osait même plus faire un pas, ni soulever un livre de peur de déranger un souvenir; les premiers jours furent les plus douloureux, les journaux du matin n'étaient qu'une suite de signes sans voix, le vieux club sous la fenêtre qui avait pris la forme du lecteur n'épousait plus son corps, il errait dans un chaos immense, un océan de vide qu'il n'avait plus de bras pour manipuler; c'est sa voisine de palier qui lui fut d'une aide providentielle, lorsqu'elle s'alarma non seulement de sa triste mine, mais surtout de ne plus entendre jouer le piano; il se rendit compte alors qu'il avait oublier sa chére musique, et que cet oubli devait contribuer a l'insupportable poids de son joug; le soir même il se remit a jouer, mais rien ne sortait; ses bras étaient lourds et son jeu purement mécanique semblait retenir les muses loin de lui et non les enlacer; il se ravisa, décida de déplacer le piano au centre de la pièce, ce qu'il fit non sans mal en tournant autour de l'instrument plusieurs fois; puis essoufflé, désorienté, se remit a jouer mais cette fois en improvisant librement ses réponses de mains a mains, et entre ses doigts, sur l'ivoire noire et blanc de l'échiquier, la musique refila l'arc électrique entre les pôles de son être déchiré; son mouvement redevint virtuose et il soupira de l'infinie tendresse de la musique recollant les morceaux de sa chair mutilée comme celle de Kassim par les voleurs; la musique lui offrit son trésor de compréhension intuitive, et a travers elle il reconnu que sa souffrance parlait de son unique désir; elle en parlait d'ailleurs autrement qu'en terme d'enseignement, avec ces mots qu'il n'avait plus, mais pas encore tout a fait en termes de vocation et de composition; il constata alors que la modification brutale de sa situation historique, n'avait rien changer a son désir, sinon qu'en perdant une existence active dans le monde, il avait plongé plus profond dans la musique, et avait échangé l'émiettement de son désir écartelé dans les apparences du surmenage, contre une cohérence secrète qui le guidait et qui le comprenait, ou plutôt le rendait compréhensible, l'unifiait en une si totale cohérence qu'il se sentie bientôt suffisamment d'énergie et de ressource pour se remettre enfin a vouloir ce qu'il avait toujours désirer: composer; il joua toute la nuit sans sentir le temps passer, en repensant a tout ce qui avait fait et faisait encore la cohérence et la raison essentielle de son existence, sa passion pour la musique, qui prise absolument n'avait aucune place dans le monde des hommes qui n'exigent que l'apparat de la cohérence, les résultats frauduleux du relatif masquant la plus implacablement froide des raisons paradoxalement évidée de sa passion et de toute pensée; la différence n'avait rien changer, sinon qu'il s'envisageait artiste maintenant, par la force des choses, et aussi qu'il envisageait l'art justement comme un moment ou l'existant se rend compréhensible, devient conscient d'être un tout cohérent qui loin de tomber dans le néant en étant extirpée du groupe, ou jamais n'advient ce genre de chose, s'éprouve en rapport a quelque chose d'autre qui le comprend parfaitement et dont témoigne l'oeuvre, sans pour autant que l'oeuvre invente ce par quoi il se sent comprit, puisque bien au contraire, comme cette musique d'une infinie tendresse qui le calmait, c'est elle qui crée l'artiste; et il rapprocha cette idée de l'oeuvre de celle de la passion qui est aveugle et se concentre sur sa propre intelligence éternelle et impossible d'un être donné a lui-même dans des conditions contingentes et multiples qu'elle réunit et transcende en une totalité dont l'autre est le secret omniscient; ainsi de Schubert, de Stravinsky, de Beethoven, composer c'est écrire secrètement pour une femme, ce n'est pas jouer avec la matière sonore, illustrer un thème arbitraire, une fable ou un mythe, ce n'est pas non plus dévoiler le monde dans son apparaître vrai, ou se détourner du savoir pour voir l'Inconnu nu, c'est tout cela a la fois et plus encore produire de la distorsion ou l'amour recrée du sens, c'est mettre de la matière spécifique entre les êtres, tisser de l'humanité en communicant de l'existence de manière a ce que l'acte le plus profond de la réflexion, le plus idéal et la plus abstrait puisse oeuvrer dans un chaos et se révéler par l'effondrement du chaos, et de toute matière opaque a la certitude éternelle qui ne serait pas une scène de l'amour aveugle; toute oeuvre n'est que le témoignage de la compréhension qu'un être a de son être; mais la conscience suppose un rapport indirecte dont la matière insignifiante peut prendre une forme paradoxale qui dévoile en s'effaçant; ainsi pour Nanj l'énigme de son exclusion était une chance providentielle qui lui révéla la nature contradictoire de sa passion et de celle des hommes a courte vue bien plus obsédés par la différence du bien et du mal et le péché capital de son savoir, que par l'unité d'un cercle ou devenir une énigme a soi-même c'est se comprendre en dieu, cercle paradoxal que les hommes, de père en fils ne voient et ne soupçonne même pas, mais qui est, dit-on, révélé; et si l'existence de Nanj se transforma ainsi aussi radicalement, au point de faire sens avec le non sens de son existence de professeur abrégé, c'est que la passion de la musique survécu a l'effondrement d'une forme imparfaite qui recycla tout le contenue historique de sa vie, en celle de cet être neuf de compositeur sédentaire, qui au contraire de toute autre oeuvre humaine, était une production divine capable de lui insuffler a nouveau la vie; et cette passion qui maintenant lui tombait dessus avec toute ces conséquences réelles, elle venait de vidait son appartement de tous les anciens symbole de sa vie d'avant, et lui ouvrait l'espace indéfinie de l'avenir de son être en composition; le monde qui l'instant d'avant était plongé dans l'angoisse et l'indétermination, refaisait sens autour de tout ce qu'il était en lui d'être; il en avait l'incommunicable conviction; déprécié des hommes, parce qu'il s'était abandonné complètement a sa passion, celle-ci plus que jamais signifiait enfin en lui le sens d'une intention pour laquelle, toute sa vie avait été soudainement chamboulé, moins par une réorientation, que par une remise en forme de toute ses activités et concentration de de ses forces a l'usage de la création artistique et de la composition qu'il avait toujours secrètement désiré; il lui sembla qu'il avait été a nouveau frappé par la foudre et que son isolement était a la fois la conséquence de son exclusion, et l'assomption de sa propre identité dans la passion; son appartement s'éclaira brusquement autrement, il lui semblait que la réflexion la plus impalpable au fond de sa conscience prenait corps dans la pièce, et que le moindre objet redevenait signifiant; mais chose étrange la passion ne semblait plus habiter en lui, mais venir de l'extérieur de son corps, comme si le tapis persan sous ses pieds, les rideaux aux fenêtres et les chaises en paille tressée étaient soudainement devenues l'histoire de sa passion invisible, car la passion fait feu de tout bois comme la création; ou encore, comme si son appartement avait été plongé au fond d'un lac ou les choses n'étaient plus rien en elle même mais semblaient dissolues dans une transparente cohésion d'un secret ou rien ne changeait pourtant de place; il vécu ainsi quelque temps, presque hagard, abasourdit non par la méchanceté des hommes, mais par la beauté et la bonté qui se révélaient derrière leur monde d'usurpation, groggy comme si l'explication de la vie lui était tombée dessus, pas a la manière d'une science, mais d'un choc, d'une lucidité d'énigme, d'un prisme sur le coeur dont la passion est la clef; cette passion si étrangement insituable, qui prenait désormais ses vraies proportions, non plus contenu dans son corps de professeur de lycée, mais comme monde, unie vers l'être qu'elle révèle, comme aspiration plus grande que lui qui recouvrait les murs de son appartement et ses tapis et en même temps rendait le devenir de l'esprit présent dans la matière du corps affecté; c'est alors qu'il su qu'il devait se mettre a créer c'est a dire a rendre concret la forme et le contenu de la pensée ou sa passion le rendait compréhensible; ainsi dieu qui se comprend immuablement aimant et tout puissant peut créer l'homme libre et a son image s'il pense a Lui comme a Un être auquel tout est possible, même et surtout l'impossible c'est a dire quand il pense avec passion, de toute son âme et de tout son corps que le non-sens de la vie le rend compréhensible a la compassion de Dieu; la passion de Nanj tournait autour de ce pivot secret plus enfouie et plus immuable que la constante de la lumière; plus inaccessible qu'elle encore; secret enfouie a la croisée des chemins entre l'idéal et le réel se répondant absolument, se redoublant dans la passion qui a la fois en révélait l'unité et la transcendance dans l'impossibilité du fait d'exister, et le vivait en rendant compréhensible l'incompréhensible dans la distorsion du temps propre a l'existant qui gracieusement coïncide avec l'élucidation de son désir par l'effondrement du non-sens.

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