Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/09/2016

Motlogie

Exister lui était devenu totalement invérifiable; il ne vivait plus que de fragments de conte, dans une tension irréductible entre la forme et le fond, comme si, parvenu aux limites du continent de la langue son existence avait chu dans l’océan informe et nu d'un écart incompressible entre les deux rives informulables de la fission des signifiants et du signifié; mais parcourir les tensions entre les derniers icebergs, flotter parmi les derniers frissons d'une langue dont la fonction s’évanouissait, n’était pas simple pour les naufragés qui ne s’enfonçaient pas dans cette voie sans ressentir a la fois l’extrême opacité de leur vie envahir leur absence, de plus en plus concrète, de substance et sans vivre l’absence d'espoir comme une mort permanentée; beaucoup ressentaient qu'ils n'avaient pas plus de matière qu'un sucre dans le café; les arbitres de la langue avaient remplacé les plateaux de la balance par des chronomètres qui mesuraient la puissance floculante des esprits en dissolution dans le sprint du temps sans tain; au delà des dernières glaces continentales, le système sanguin était saucissonné par autant d’écluses qu'il y avait de syncopes devant l'impossibilité de dire scientifiquement la continuité des sauts qualitatifs; la sensibilité incohérente, divorçait d’elle-même, et intérieurement, en lieu et place de la pensée s'ouvrait la gueule béante du gouffre regorgeant de spectres et de craintes que , sans langue, on ne pouvait plus dominer; en plein océan de vacuité, l'esprit touchait a son fond nerveux et chaque monade se sentait en permanence dédoublée, disséminée sans éclat, écrabouillé sous les auspices de lois naturelles dont le secret de la subsomption avait été perdu enseveli et consommé par le monde marchand qui prétendait, faussement, les avoir maîtriser; enfin il devenait impossible de douter que la mathématique fut la langue naturelle de la création, et c’était par le plus profond désarroi de la sensibilité, par la plus radicale des dérélictions, auquel les dogmes univoque de la raison avait mené, qu'enfin, la création apparaissait, après l'effort vertigineux du renoncement a soi, comme agrégé par l'unité supérieure d'une parole continuée. Il aurait suffit de dire je t'aime, de formuler et de se tenir a une promesse pour que le secret de la cohésion réapparaisse et comprime le vertige en une sphère sensée; mais, bien évidemment, dans ces conditions dégradées, rien n’était plus difficile aux désespérés que d'en revenir aux sources limpides de la langue et de la promesse formulée; au mieux, au prix d'un terrible effort de lucidité sur eux-mêmes, pouvaient ils a peine se figurer la sente d'une renaissance dans le grouillement des vers qui rongeait l'ancien corps du monde et leur enseignait comment la désagrégation des barreaux de l’échelle fondait un monde nouveau.

Les commentaires sont fermés.